La mort de George Floyd, ou quand tuer sous le sceau de la légalité est un plaisir
La mort de George Floyd
ou quand tuer sous le sceau de la légalité est un plaisir
Depuis le lundi 25 mai 2020, en France comme partout en Europe - et partout où les Blancs sont majoritaires - aucun journaliste, aucun intellectuel, aucun homme politique n’ose prendre sa plume pour se poser cette question : comment expliquer qu’un homme chargé de l’autorité publique – un policier – soit capable de tuer avec un évident plaisir un autre homme en l’asphyxiant sur la voie publique tout en toisant les cameras qui le filment ?
Aucun journaliste ou intellectuel blanc ne fera sur cette terre ce travail de réflexion pour la simple raison que la victime est un Noir et le bourreau un Blanc. En France comme dans tous les pays majoritairement blancs, il s’agit d’un fait divers qu’on se racontera entre le fromage et le café ou en mordant à pleine dent dans son hamburger acheté chez Macdo. Il est loin, très loin le temps où d’audacieux blancs mettaient leur notoriété littéraire ou artistique au service d’une cause humaine n’ayant pas la couleur blanche.
Et pourtant, il suffit de regarder le film de la mort de l’Américain George Floyd pour ne pas croire à un fait divers ; une expression qui passe dans le langage populaire pour un malheureux accident. Non ! Voir cet homme noir, qu’on imagine aisément d’une stature impressionnante, couché sur le ventre - et donc la face contre terre – les mains menottées dans le dos, fermement maintenu immobile par la force d’un policier pendant que son coéquipier - les mains dans les poches pour prouver la magnificence de sa méthode - l’asphyxie par la force de pression de son genoux et du poids de son corps, est une scène absolument sidérante. Tout un art que le policier blanc qui opérait la mise à mort a tenu à prouver en regardant les cameras qui le filmaient. Il a même un moment sorti les mains de sa poche pour montrer qu’il ne s’en servait pas. Effectivement, au bout de trois ou quatre minutes, il est parvenu à ôter la vie à ce grand nègre sans se servir de ses mains. Quelle prouesse admirable ! Le troisième policier – d’origine asiatique - qui écartait les quelques rares passants qui les approchaient de trop près, était tout à fait admiratif ! Pendant de longues minutes, on voyait qu’il se demandait si son collègue allait y arriver. De toute évidence, au regard de leur impassibilité, de leur tranquillité à agir, ces trois policiers n’étaient pas à leur premier crime par cette méthode d’étouffement. Le corps noir est assurément un jouet pour les policiers dans certains pays.
Le Site de la radio RTL est absolument ignoble d’employer l’expression «bavure policière» pour qualifier la mise à mort avec délectation que montrent les cameras que fixait le bourreau. Que faut-il à un Blanc pour qualifier de crime la mort d’un Noir qu’on étrangle alors qu’il n’a aucune possibilité de se défendre ? Il suffisait peut-être que la victime soit tout simplement Blanche. George Floyd n’a pas eu cette chance-là. Le jour où, dans un pays majoritairement noir, le corps des Blancs deviendra un jouet entre les mains des policiers, nous verrons bien si les Blancs continueront à se murer dans le silence comme ils le font actuellement.
Raphaël ADJOBI