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Lectures, analyses et réflexions de Raphaël
24 avril 2012

Les dozos de Côte d'Ivoire, dernier vestige de la contribution des Noirs aux traites négrières

       Les dozos de Côte d’Ivoire, dernier vestige

de la contribution des Noirs aux traites négrières

Dozos de C            On les appelle communément « chasseurs traditionnels ». Mais rares sont ceux qui savent ce que cache ce vocable. De quelle chasse s’agit-il, en effet ? Dans cette zone de savane du nord de la Côte d’Ivoire, quel gibier chassait cette confrérie armée de fusils et de coupe-coupe et vêtue d’un uniforme reconnaissable de loin ? Naïfs sont ceux qui, aujourd’hui, ont vite cru que ces hommes subissaient des rites sensés les rendre invulnérables aux balles pour aller à la chasse aux sauterelles ou aux serpents pullulant dans ce nord peu peuplé. Il convient de tourner son regard plus loin vers le passé pour découvrir la vraie histoire de cette confrérie qui, faisant de son habillement un réel épouvantail, ne peut en aucun cas être prédatrice du monde animal. 

            Non, quand on travaille à se rendre invulnérable aux armes à feu, on ne va pas à la chasse aux animaux qui, jusqu'à preuve du contraire, ne portent pas de fusils. La formation de ces groupuscules aux déguisements effrayants remonte, de toute évidence, à la traite négrière musulmane, entre le 8è et le 16è siècle. Avant les peuples côtiers qui ne jouiront d’armes à feu qu’à l’avènement de la traite atlantique, les populations du Sahel, elles - avec les zones de savane, pour être plus large - vont, au contact des arabes, très tôt apprendre leur maniement. Aujourd’hui encore, dans tous les pays d’Afrique occidentale sahélienne de confession musulmane, jusqu’au Maroc et en Algérie, les fêtes au cours desquelles l’on tire des coups de fusils en groupe sont choses courantes. 

            Les dozos de Côte d'Ivoire ne sont en réalité qu'une survivance de la contribution des Noirs aux traites négrières musulmane et atlantique. Leur vocation première était la chasse à l'homme. Enlever hommes et femmes dans les champs, incendier les villages et faire des captifs, voilà ce à quoi ils étaient formés. Leur présence aujourd'hui dans le paysage  militaire du pays ne peut donc que réveiller des souvenirs peu agréables pour l'Afrique, des souvenirs dont notre continent ne tire aucune fierté. Certes, si le crime de l'esclavage a toujours été préparé et financé dans des cercles à l'étranger, s'il est vrai qu'il y a eu à chacune de ses étapes des résistants, force est de reconnaître que les réseaux de Noirs africains attirés par l'appât du gain ont prêté main forte aux Arabes et aux Européens pour leur faciliter la tâche. De même qu'aujourd'hui, malgré les mouvements de résistance à la recolonisation de l'Afrique, certains Noirs se prêtent volontairement comme instruments locaux aux actes de prédation des Européens sur le continent.

            Les Ivoiriens ne peuvent donc nullement être fiers d'abriter en leur sein un vestige du passé qui n'honore pas la mémoire de l'Afrique. Quand, il y a plus de dix ans, les dozos ont commencé à défrayer les chroniques des médias locaux, c'est avec des quolibets que le public accueillait leurs aventures qu'il jugeait pittoresques. On redoutait leur violence, certes ; mais c'était tout. Et parfois même, pour se garantir des vols et des intrusions nocturnes à leur domicile, certains riches propriétaires louaient leurs services et en faisaient des gardiens. Personne n'osait alors s'indigner de l'existence d'une telle milice au sein d'une nation moderne comme la Côte d'Ivoire. Cela dura jusqu'au moment où ces dozos s'engagèrent aux côtés des rebelles ivoiriens venus du Burkina Faso et qu'on les vit égorger allègrement les populations. Dès lors, tout le monde prit peur. Mais qui aurait à l'époque osé demander leur disparition ? Les Nordistes ivoiriens auraient crié à la chasse aux diaoulas ! On se tut donc et on se mit à serrer les fesses. Malheureusement, en 2011, l'irréparable se produisit : les dozos massacrèrent la population de Doukoué dans le seul but de permettre aux populations du nord (communément appelées "dioula"), du Mali et du Burkina de s'approprier des terres nouvelles. Devenus les supplétifs de l'armée des rebelles au service du prétendant de la France et de l'Onu au fauteuil de président de la République, ils ont eu le sentiment qu'ils avaient une mission sacrée à accomplir puisqu'ils étaient désormais intouchables. 

Dozos de C            Les Ivoiriens ont toutes les raisons d'avoir honte de voir que les gouvernants actuels, installés par des forces étrangères, s'appuient sur les FRCI, des soldats issus d'une ethnie ou d'une ère géographique spécifique, pour gouverner. Mais plus grande encore doit être leur honte de voir ces dozos, vestige du passé esclavagiste de l'Afrique, devenir les supplétifs d'une armée que l'on voudrait nationale. Comment une confrérie de chasseurs d'esclaves ayant des pratiques occultes et sanguinaires peut-elle servir une nation parallèlement à son armée qu'on voudrait républicaine ? N'est-ce pas laisser le diable entrer dans nos rangs ?  Seule une dictature peut faire de ces êtres singuliers un organe d'utilité publique parce que leurs moeurs violentes immuables lui sont nécessaires. Et qu'aucune presse étrangère ne s'interroge sur l'existence dans les FRCI de cette excroissance dépareillée aux moeurs sauvages et non point militaires - alors que les patriotes sont qualifiés de miliciens antidémocrates - est assez troublant. Oui, trop troublant pour ne pas ressembler à de la complicité avec le nouveau pouvoir aux allures dictatoriales.    

Raphaël ADJOBI   

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Commentaires
S
Si vous tenez à parler de source, ayez l'honnêteté de décliner votre identité et avancer à découvert. Sinon, votre seul pseudonyme est la preuve de la vacuité de votre personnage, c'est-à-dire de ce que vous êtes. <br /> <br /> <br /> <br /> Selon vous, "les dozos sont tout sauf musulmans" et en même temps "animistes". Relisez-vous pour vérifier que je ne falsifie pas vos propos ou pour vous rendre compte que vous racontez des bêtises. <br /> <br /> <br /> <br /> Apportez-nous ici la preuve de ce que vous racontez, puisque des chasseurs du gibier humain passe dans votre culture pour des gardiens d'une tradition séculaire qui ne vous choque pas. Moi, à la lecture des livres publiés sur ce blog, j'atteste devant tous que les dozos sont des rabatteurs de gibier humain. A vous de me diriger vers vos travaux pour voir le contraire. <br /> <br /> <br /> <br /> Raphaël ADJOBI<br /> <br /> dit St-Ralph
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K
Je me demande vraiment sur la source de ce qui est raconté ici. <br /> <br /> Les dozos sont tout sauf musulmans; au contraire ils sont considérés comme la branche armée dans la spiritualité bambara (common, doh...) "animisme". C’est d’ailleurs eux qui pratiquent encore la spiritualité africaine dans la culture mandingue en Afrique de l’Ouest et hostiles aux religions Abrahamiques. <br /> <br /> Ces dozos font partie de ceux qui se sont battus et veillés sur nos traditions et pas le contraire. Revoyez vos sources encore svp.
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S
Mon cher cuntatator, je suis heureux que tu cherches à comprendre. Je n'ai pas donné une suite immédiate à ton message parce qu'il est l'exact reflet de ceux qui ne savent pas et qui veulent savoir. Ce qui est un geste très honorable ! Et pour satisfaire une telle curiosité légitime, on doit se montrer clair et précis. Merci pour ton désir de comprendre parce que certains auraient choisi de m'insulter ou d'avancer des âneries au lieu de chercher à comprendre. <br /> <br /> <br /> <br /> Je dirai franchement que ce que j'avance ici ne repose pas sur des écrits historiques. Cependant, il convient de retenir avant toute chose que concernant l'histoire des réalités africaines, nous avons surtout les récits oraux qu'il convient d'ailleurs de consigner avant qu'il ne soit trop tard. Pour l'heure, il n'y a que les recherches de Malek Chebel (L'esclavage en terre d'islam) et la vie de Joseph Kessel par Yves Courrière qui évoquent ces groupes africains qui sillonnent les régions pour faire des captifs. C'est un vrai métiers. En Amérique, les espagnols les appellent les rancheadores. Les Français eux parlent des marrons (esclaves fugitifs) mais n'ont pas donné de noms aux organisations chargées de leur donner la chasse. <br /> <br /> <br /> <br /> Nulle part en Afrique, je dis bien nulle part en Afrique, surtout en Afrique occidentale, il n'existe de confréries de chasseurs d'animaux ! De quels animaux peut-il s'agir ? Quel type d'animal représenterait un danger si extraordinaire au point de nécessiter une organisation aussi extraordinaire que celle des dozos ? C'est la question que tu pourrais poser à ceux qui emploient le terme "chasseurs traditionnels" pour les désigner. Dans toutes les sociétés anciennes, l'homme a vécu de la pêche, de la cueillettes et de la chasse. Mais Nulle part, il n'apparaît des sociétés secrètes avec rites de sang pour aller chasser en groupe de 50 ou de 100 un quelconque gibier. Ponctuellement, tout un village peut être mobilisé quand un animal particulier représente un danger. Les chasses à cour en Europe ne sont que des amusements royaux. Rien à voir avec une tradition de la population exprimant un besoin vital par la chasse. Absolument rien ! <br /> <br /> <br /> <br /> Ce que je dis ici tient à la conclusion faite à partir de ce que l'on raconte dans les villages de Côte d'Ivoire. Le terme "chasseur" n'est qu'un euphémisme de chasseur d'hommes dans les consciences populaires des villages de Côte d'Ivoire ! N'oublie pas que la traite négrière a nourri la vie quotidienne africaine durant plusieurs siècle et que les organisations des société s'est faite surtout contre l'attaque ou la défense. Il n'y a pas très longtemps que les choses ont changé. Dans les années 60, quand les populations du Nord ont commencé à s'installer durablement dans le sud de la Côte d'Ivoire, les populations du sud ne laissaient jamais leurs enfants sans protection en présence des gens venus du nord. Je ne sais pas si ce que je dis là t'étonne, mais c'est la réalité que j'ai vécue. Il n'y a pas mal de petites anecdotes que je pourrais livrer. Mais il faut les analyser et en faire un magasin de faits pour l'histoire. <br /> <br /> <br /> <br /> Les Africains n'aiment pas raconter leur passé esclavagiste. Une seule fois j'ai entendu mon grand-père l'évoquer de manière explicite. Obambé fait remarquer dans son commentaire qu'un Ivoirien - certainement originaire du Nord - dit que les dozos sont en quelque sorte des chevaliers (comme au Moyen âge en Europe). Cet ivoiriens avoue avoue à sa manière que leur titre de "chasseurs" n'a rien à voir avec la chasse aux animaux.
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C
je me souviens de l'étrange impression que me firent ces gens drôlement déguisés, échoués à une époque qui n'est pas la leur. on les voyait dans les quartiers résidentiels d'Abidjan où ils étaient gardiens de nuit. Leurs supposés pouvoirs magiques nourrissaient essentiellement les conversations à leur sujet. jusqu'à ce que, grâce à la musique, je m'intéresse à l'empire mandingue,c'était tout. Depuis je n'en sais pas davantage, mais je n'ai rien qui les décrive comme marchands d'esclave; on les décrit plutôt comme une confrérie de chasseurs, comme il y en avait plusieurs dans ces contrées, puissante et crainte du fait de ses fétiches redoutés. J'en déduit qu'il s'agit de simples chasseurs qui pérpétuent des reliques de ce que cette confrérie fut. Quant à l'aspect politique, leur intervention aux côtés d'un camp de la crise ivoirienne, elle est indéniable.<br /> <br /> <br /> <br /> Merci pour cette info St Ralph, pourrai-tu si possible fournir quelques références sur l'histoire de ces drôles de chasseurs?
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S
Cher Alenya,<br /> <br /> <br /> <br /> je crois que la bonne observation est celle faite par Obambé. Il n'y a pas très longtemps que je sais que Jules Ferry était un très grand partisan du colonialisme et surtout un idéoloque qui défendait la hiérarchisation des cultures, des civilisations et des races. J'avoue avoir été surpris que l'on parle spontanément et publiquement du côté obscure de Jules Ferry. En général, on évite ces pages de notre Histoire. Je me demande qui a osé ce sacrilège ? <br /> <br /> <br /> <br /> J'ai été aussi surpris d'entendre certains lycéens évoquer ce côté obscure de l'homme. Cela m'a fait plaisir parce que cela m'a fait comprendre que nous sommes en train de faire du chemin vers une meilleure connaissance du passé colonial et du passé esclavagiste de la France. Le vivre ensemble ne peut se faire correctement qu'en assumant le passé commun. <br /> <br /> <br /> <br /> Je suis en train de me demander si on peut en vouloir à François Hollande d'avoir choisi Jules Ferry comme symbole de son septennat. Le fait de ne pas cacher le côté obscure de l'homme contribuera peut-être à aider la nouvelle génération à lui pardonner sa faute. <br /> <br /> <br /> <br /> Content de ton passage ! A bientôt.
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