Le Montespan ou le cocu du roi Louis XIV (de Jean Teulé)
Le Montespan
ou le cocu de Louis XIV
(Jean Teulé)
Le Montespan est un roman historique ravissant ! Ceux qui, comme moi, ont été quelque peu traumatisés par Mangez-le si vous voulez vont retrouver le sourire en lisant Le Montespan. Ici, Jean Teulé parle gaiement de cocus, de putains, de bâtards difformes, du sexe du roi et des cornes de la honte que Versailles transforme en cornes d'abondance. Mais chut ! N'allez pas gêner les royalistes en les mettant dans une fâcheuse posture.
Quand à vingt-deux ans, Louis-Henri, marquis de Montespan, épouse la blonde et voluptueuse Françoise de Mortemart le 28 janvier 1663, leurs complices espiègleries semblaient leur promettre des jours merveilleux. En effet, quand on vit de rentes et que l’on a du temps devant soi, on peut s’amuser à faire l’amour sans vergogne partout et à tout moment. Toutefois, pour éviter l'ennui qui guette sa femme et le déclin qui menace leur train de vie, le jeune noble se met en quête de gloire guerrière qui les rapprocherait des fastes de Versailles.
Après deux enfants, Françoise - que son tendre mari appelle délicieusement Athénaïs – participe enfin à une fête dans un salon de la noblesse. Elle y « rayonne comme un enfant joue à la princesse parmi les rires qu’elle déclenche ». Elle a des persiflages pour tout le monde. Son esprit séduit. On lui propose de devenir dame d’honneur de la reine. Mais « Versailles est un pays effroyable et il n’y a pas de tête qui n’y tourne. La cour change les meilleurs ». Très vite, Athénaïs est élevée au rang de favorite, c'est-à-dire maîtresse officielle du Roi-Soleil !
D’ordinaire, « l’honnête homme trompé par le roi s’éloigne et ne dit mot ». Mais voilà que Louis-Henri a le mauvais goût de se plaindre que le roi séduise sa femme. Son beau-père a beau lui crier « Louis-Henri, être cocu, c’est la chance de votre vie. Ne la ratez pas, elle ne repassera pas », le jeune marquis ne renonce pas à son amour. Au grand plaisir des chansonniers de l’époque - n'en déplaise à Molière qui a pris le parti du roi - il orne son carrosse de cornes gigantesques et entre en résistance pour crier son infortune et dénoncer ce privilège royal.
On devine aisément que le combat est inégal. Cependant, l’amour fait accomplir des prouesses insoupçonnées. Comment lutter sans arme à la main contre la puissance royale, contre « Sa Majesté qui, elle seule, peut décider qui doit mourir et comment chacun devra vivre » ? C’est donc le combat du pot de terre contre le pot de fer que nous propose Jean Teulé dans ce magnifique récit agrémenté de peintures pittoresques de bouches édentées, de dents cariées, de perruques poudrées mises de travers et de vêtements sales à couper le souffle. On reconnaît sous sa plume le style de Saint-Simon et de Jean de La Bruyère croquant des portraits savoureux des gens de leur siècle. Crus et enjoués, ces portraits ne révèlent pas moins les caractères de la société du XVIIe siècle.
Raphaël ADJOBI
Titre : Le Montespan, 333 pages
Auteur : Jean Teulé
Editeur : Julliard, Paris, 2008
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