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Lectures, analyses et réflexions de Raphaël
4 août 2016

Le travail du dimanche, une conquête esclavagiste du capitalisme

                                    Le travail du dimanche

            Une conquête esclavagiste du capitalisme

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            S'il est vrai que "La nuit c'est fait pour baiser (et) pas pour travailler", comme le crie un collectif de femmes, il est également vrai que le dimanche est fait pour se reposer et non pour travailler.

            Le travail du dimanche que les patrons veulent banaliser en France mérite l’attention de tous. Il ne faut absolument pas se fier à leurs bons sentiments quand ils affirment que cela se fera toujours sur la base du volontariat. Car la caissière volontaire pour travailler entraîne forcément dans son sillage des vendeurs et autres employés qui ne le sont pas et vice versa.

            Dans ce projet, les patrons ont le ferme soutien d’une frange importante de la population soucieuse d’arrondir ses fins de mois. Galvanisée par le slogan « travailler plus pour gagner plus », elle ne se rend pas compte qu’elle lâche la proie pour l’ombre, le jour de repos pour l’argent qui lui donnera l’illusion d’être plus riche qu’avant. De toute évidence, si les gens sont volontaires pour travailler le dimanche, c'est parce que cette journée est davantage payée. Mais il est certain que quand les employeurs considéreront qu'un jour de repos en vaut un autre, la majoration du dimanche disparaîtra.

            En effet, pourquoi celui qui travaille le dimanche et se repose le lundi devrait-il gagner plus que son collègue qui travaille le lundi et se repose le dimanche ? A partir du moment où tous les jours de la semaine perdent leur caractère sacré, quel droit a-t-on de revendiquer la prédominance d'un jour sur un autre ?        

            Notons aussi que les conséquences néfastes de cette conquête que vise le capitalisme ou de cette quête de certains de nos compatriotes sont immédiatement reconnaissables et devraient faire réfléchir chaque citoyen : absence de vie de famille, mauvaise éducation des enfants condamnés à des heures de solitude devant le réfrigérateur garni et le téléviseur dernier cri payé à crédit que l'on tente de rembourser par l'argent du travail du dimanche. Demain, ces parents qui ont équipé leurs enfants de tous les appareils électroniques à grand frais croyant faire leur éducation, iront partout crier aux enseignants qu'ils sont dyslexiques et méritent une attention particulière. Quant à nous, nous savons qu'il s'agit de cette attention particulière qu'ils ont été incapables de leur accorder.

            N’allons pas plus loin dans cette analyse des conséquences de l'absence des parents auprès de leurs enfants et revenons au sens même de cette conquête du dimanche que le capitalisme tente de gagner par des arguments fallacieux. Le dimanche est reconnu dans notre société comme le jour de repos, le jour devant nous délasser des peines de la semaine. Un jour réparateur des fatigues enregistrées par notre organisme et qui offre en même temps à toute la famille l'occasion de se retrouver pour partager les joies et les peines et panser éventuellement les plaies des âmes. Si, depuis des siècles, les sociétés modernes n’ont pas eu du mal à légiférer sur la nécessité du repos hebdomadaire, c’est parce que, humainement et moralement, les hommes en sentaient les bienfaits et éprouvaient le besoin de le perpétuer pour le bon équilibre de tous. Mais le plus important à retenir c'est que les hommes étaient d’accord pour juger que le fruit des jours travaillés était toujours suffisant pour faire vivre chacun convenablement.

            Il convient donc de dire qu'il appartient à l’Etat de garantir à chaque travailleur une rémunération suffisante lui permettant de vivre convenablement sans avoir à vendre son jour de repos pour compenser un quelconque manque. En d’autres termes, c’est une honte pour l’Etat français de proposer aux citoyens de travailler le dimanche afin de compléter un salaire devenu insuffisant et ne permettant plus une vie décente.

            Force est de constater que ce manquement à la logique du repos hebdomadaire est né avec l’appétit des sociétés capitalistes. L’histoire de l’esclavage des Noirs dans le Nouveau Monde nous en donne la preuve depuis le XVIIe siècle.

                        L’origine du dimanche travaillé et payé

            Le régime esclavagiste français qui soumettait les Noirs des colonies à l’exploitation exclusive des produits d’exportation vers la métropole leur laissait le dimanche comme jour de repos. Reposer les muscles pendant une journée, c’était préserver le rendement des plantations. A cette fin, l’alimentation des esclaves dépendait totalement du bon vouloir des maîtres. Malheureusement, alors que ceux-ci affirmaient « fournir abondamment à leur subsistance et à celle de leurs familles », on assistait à la malnutrition et à la sous-nutrition de la main d'œuvre servile noire. Les films qui peignent les esclaves à la carrure herculéenne sont loin de la réalité, du piètre état sanitaire de ces hommes, de ces femmes et de ces enfants.

            D'ailleurs, si leur avarice les poussant à réduire l’alimentation des esclaves accroissait leurs profits, les maîtres se rendaient compte aussi que les carences occasionnées dans les organismes contribuaient à la baisse de la production sur les plantations. Quoi faire ? Peu à peu, ils réservent aux esclaves des lopins de terre où ceux-ci peuvent se livrer à des cultures vivrières. Ils finissent même par leur concéder une journée pour cette tâche afin de mieux lutter contre la faim et la malnutrition qui menace le capital. On parle alors du « jardin nègre » et du « samedi nègre ».

            L’édit royal de 1723 dénonce cette pratique et maintient l’obligation des maîtres de nourrir et vêtir leurs esclaves. Mais, impuissante devant ce qui devient une habitude, la législation finit par légaliser « le jardin nègre » et le samedi qui lui est consacré en 1786, déchargeant ainsi presqu’officiellement les maîtres de leur obligation de nourrir ceux qu'ils soumettent au travail forcé.

            Dès lors, les  esclaves usent de tous les moyens pour compenser les rations alimentaires insuffisantes. Si certains « négligent leur travail (forcé) quotidien au profit du maître et réservent leur force pour l’entretien de leur jardin » au risque de grands châtiments (Libres et sans fers, p. 141), très nombreux sont ceux qui consacrent une bonne partie de leurs nuits et de leurs journées de repos – les dimanches ou jours de fêtes religieuses – à cette tâche devenue incontournable.

            Bientôt, le temps que les esclaves consacrent à leur jardin va attirer la convoitise des maîtres toujours désireux de faire des profits. Théoriquement, la législation en vigueur dans les colonies ne leur permettait pas de faire travailler leurs esclaves les « dimanches et jours de fêtes ». Dans la réalité, les esclaves de maison ou domestiques n'ont jamais bénéficié de jours ou de nuits complètes de repos. C’est donc principalement les activités dominicales des « esclaves de pioche » ou « esclaves de houe » (ceux des champs) que vont convoiter les maîtres. Peu à peu, ils vont les employer le dimanche moyennant une petite rémunération. Ainsi, le temps passant, le dimanche consacré au repos et à cultiver éventuellement son jardin pour compenser la nourriture insuffisante va revenir au maître qui va pouvoir désormais disposer de ses esclaves comme il le veut.

            Voilà comment dans les colonies les maîtres ont volé aux esclaves leur temps de repos pour faire des profits. Au regard de l’Histoire, il appartient aujourd’hui à chacun de réfléchir à la disparition du temps du délassement du corps et de l’esprit au profit des mirages du capital qui n’ont rien à voir avec le bonheur de l’individu et de la famille. Dans une société qui se vante d’être très riche et très puissante comme la France, chacun doit exiger d’être suffisamment bien payé pour ne pas être obligé de travailler le dimanche pour améliorer le quotidien au détriment de ses obligations conjugales et familiales. Le travail du dimanche, comme celui de nuit, doit demeurer exceptionnel. La journée de repos doit être obligatoire pour tous les salariés et cela pour une question de santé physique et mentale. C’est à l’Etat de protéger le citoyen contre la rapacité du capitalisme qui ne voit que le profit.

Raphaël ADJOBI

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Commentaires
S
Atto, tu as tout à fait raison quand tu dis que l'argent qui a été dépensé le dimanche ne sera pas dépensé un autre jour. Très peu de personnes ont une bourse élastique pour se permettre de dépenser sept jours sur sept. <br /> <br /> L'état autorise le capital a dérégler la vie quotidienne des citoyens. Mais le citoyen ordinaire est lui aussi devenu un vrai mouton. Il y a des gens qui ont les grandes surfaces comme lieux de promenade le dimanche ; ils seraient malheureux de ne pas savoir où aller, disent-ils.
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A
Le travail du dimanche n'est pas payant à la longue. Au contraire, il peut provoquer des faillites. Car pour attirer la clientèle, les magasins font de grosses promo , c'est à dire qu'il casse fortement les prix. Et souvent, comptent sur le nombre de clients pour rentabiliser . Mais ce n'est jamais suffisant. Parce que ce qui a été dépensé le dimanche, ne le sera pas le reste de la semaine. Si bien que à la fin de l'exercice, le compte le compte n'y sera pas. Et que ça faire l'entreprise. Elle va rattraper en licenciant. Des ex existent. C'est le cas de certains etbs de conforma . <br /> <br /> Et dire que malgré tous ces exemples qui pullulent, le Gouvernement a quand même décidé d'ouvrir 12 dimanches dans l'année. Pour ceux qui attendent Macron , c'est un exemple de ce que peut contenir le programme de ce dernier.
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S
Merci pour cette précision qui vient appuyer l'idée que le capital cherche depuis très longtemps à conquérir le dimanche en passant par le pouvoir politique. <br /> <br /> Merci d'être passé.
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J
Si le dimanche est arrivé par la religion, il n'en est pas moins une conquête sociale. Napoléon Ier s'en est vite aperçu lorsqu'il a voulu maintenir le calendrier révolutionnaire avec les decadi (1 jour de repos tous les 10 jours) moins avantageux pour les travailleurs que le repos hebdomadaire ! Il l'a retiré bien vite !
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