Toutankhamon le nègre ou le passé des Noirs et la fortune des Blancs
Toutankhamon le nègre
ou le passé des Noirs et la fortune des Blancs
L'exploitation abusive de la belle image du couvercle du sarcophage de Toutankhamon a fait de lui le pharaon le plus célèbre de notre temps. Ce parti pris qui laisse de côté tous les autres dirigeants de l'Egypte ancienne et de Koush (le Soudan actuel) auxquels leurs peuples ont dressé d'immenses sculptures et de somptueuses tombes en forme de pyramide n'est sûrement pas conforme à la renommée de l'homme dans l'histoire de ce royaume ancien. La qualité de conservation de la couverture de son sarcophage n'est nullement la preuve qu'il a été le meilleur de tous les pharaons ou le plus aimé.
Mais, au-delà de l'exploitation de l'image de ce pharaon, c'est l'idée que les Européens véhiculent depuis un siècle qui est écœurante. De même que les manuels scolaires et les livres d'histoire donnent l'impression que les châteaux d'Europe sont tombés du ciel, par miracle - parce qu'il n'est jamais fait mention des mains des paysans et des esclaves ou serfs qui les ont édifiés en maîtrisant de multiples techniques - de même ce pharaon semble ne pas avoir eu de peuple libre et donc pas de racine attachée à la terre d'Afrique. Oui, aujourd'hui, dans la conscience collective des Européens, l'Egypte semble ne pas faire partie du contient Africain. Et tout cela pour laisser croire qu'un tel homme ne peut être qu'un Blanc ! Soucieux de s'approprier le passé de ce royaume ancien, ils négligent son environnement géographique et humain. Tous les concepteurs des manuels scolaires et presque tous les historiens européens ont, pendant longtemps, travaillé à faire croire que les pharaons sont blancs et leurs peuples des esclaves noirs.
En procédant ainsi au blanchiment de l'Egypte ancienne, les Européens ont réussi à faire de Toutankhamon une rente financière. En excluant sa négritude que dévoile sa momie et en ne présentant que la belle image du sarcophage, ils l'ont rendu acceptable aux yeux de tous les Blancs qui peuvent s'identifier à lui et l'inclure à leur histoire. Des livres, des statuettes représentant l'image du sarcophage se vendent parce que les Blancs ne le voient pas comme un nègre ! Et pourtant, c'est un nègre ! Et c'est sur ce passé nègre que prospère aussi aujourd'hui la population arabe qui occupe ce coin d'Afrique depuis le VIIe siècle de notre ère ; une population au physique gras et bedonnant n'ayant rien à voir avec les Egyptiens aux traits fin comme les populations noires actuelles de l'Ethiopie, de la Somalie, du Soudan, du Niger ou du Kenya où vivent les Masaïs. Non, l'environnement de l'Egypte a rarement compté pour les chercheurs européens. C'est d'ailleurs cet esprit négationniste qu'avoue Laurent Bavay, directeur de l'Institut français d'archéologie orientale : «Aujourd'hui, nous ne sommes plus à la recherche de trésors [...] Nous cherchons à comprendre la civilisation égyptienne, sa culture, son économie ou son rapport à son environnement» (entretien publié sur le site de France inter le 24 mars 2019). En effet, l'approche analogique a toujours fait faire des progrès à la science. Mais concernant l'Egypte pharaonique, les Européens ont toujours exclu cette méthode de travail. Il ne fallait surtout pas chercher à établir un lien éventuel entre la culture des populations noires d'Afrique et l'espace appelé Egypte ancienne. Non, il ne fallait pas accorder de l'importance aux Noirs des environs en établissant un lien quelconque entre leurs cultures et celle de l'Egypte ancienne.
Assurément, les Européens ont commis deux erreurs dans leur approche de l'histoire de l'Afrique. D'une part, en l'absence de traces écrites parmi les Noirs, ils ont décrété que ceux-ci n'avaient pas d'histoire ; par conséquent, la seule histoire qui mérite d'être enseignée à leurs yeux est celle de la conquête et de leur "œuvre" coloniale. En d'autres termes, comme le disent si bien Pierre Boilley et Jean-Pierre Chrétien (Histoire de l'Afrique ancienne VIIIe - XVIe siècle, documentation photographique) , les Blancs enseignent en réalité l'Histoire de l'Europe en Afrique et non l'histoire des Africains eux-mêmes. D'autre part, éblouis par l'Egypte ancienne, les Européens ont pris soin de l'isoler de ses racines africaines pour se complaire dans la contemplation de ses monuments et objets divers au lieu de l'étudier dans son milieu géographique et humain. Voici une conférence édifiante sur la falsification de l'histoire des Noirs et particulièrement de l'histoire de l'Egypte ancienne : https://www.youtube.com/watch?v=p6zv3NXRfLg&feature=share&fbclid=IwAR1fmz7X_2cmyaHIOwUv9AMyW5psjw_aJo8d1Pi_eM5tkXvLSs9XcroEv4o
Raphaël ADJOBI