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Lectures, analyses et réflexions de Raphaël
16 février 2009

Les Noirs Antillais contre les héritiers du "Club Massiac"

                            Les Noirs Antillais 

           Contre les héritiers du « club Massiac »

            La grève générale contre la vie chère en Guadeloupe à laquelle s’est jointe la Martinique (bientôt la Réunion et la Guyane) entre dans sa cinquième semaine. Le tiers monde de la France existe et veut montrer qu’il subit plus qu’une simple crise économique. Il vit une injustice faite d’inégalités sociales qui devraient troubler la conscience des gouvernants français et de la France en générale qu’un abus de langage appelle le pays des droits de l’homme alors qu’elle n’est que le pays de la Déclaration des droits de l’homme. Ce qui n’est absolument pas la même chose.

            Au cœur de cette tourmente qui secoue les Antilles, il y a la communauté Béké, ces descendants de planteurs Blancs qui ont laissé la politique aux Noirs pour contrôler l’économie de l’île. Les Békés, qui se caractérisent aussi par le refus du mariage avec les Noirs, détiennent 90% des terres cultivables et ont le quasi monopole de l’économie, notamment de l’agroalimentaire et la grande distribution ; faisant ainsi la pluie et le beau temps. Pour permettre à la communauté blanche de suivre le rythme infernal qu’ils imposent aux Antilles, l’état alloue depuis fort longtemps une « prime de vie chère » aux fonctionnaires originaires de la métropoles appelés les « métros ». Ceux-ci constituent le tiers de la population active. On comprend alors que la grande majorité de la population des îles constituée essentiellement de Noirs ne puisse pas suivre la cadence de cette vie.

Gr_ve_Antilles

Le conflit à la lumière de l’histoire         

            Mais revenons à ces békés qui sont la source du mal Antillais. A vrai dire, ils ne sont nullement issus de l’aristocratie française comme la presse métropolitaine voudrait nous le faire croire. En tout cas, ce n’est point ce que dit l’histoire. Aux 17è et au 18ès, ce sont des aventuriers, dont beaucoup de pêcheurs et paysans Bretons, qui se sont jetés dans l’exploitation des îles avec l’aide des négriers. Les femmes de mauvaise vie étaient enlevées des zones portuaires de Nantes et de Bordeaux pour grossir leurs rangs. La méprise qui a fait d’eux des aristocrates vient des débats houleux qui eurent lieu au 18è siècle.

Suivez bien ! En 1788, sur le modèle des mouvements abolitionnistes anglais, fut crée la « Société des amis des Noirs ». De plus en plus influente grâce à ses élus à l’assemblée, elle était bien décidé à soulever la question de l’esclavage lors des états généraux qui devaient aboutir à l’abolition des privilèges et à la Déclaration des droits de l’homme. Confrontés à cette menace, non seulement les planteurs obtinrent leur représentation à l’Assemblée nationale pour contrer les abolitionnistes, mais ils fondèrent aussi une société adverse, dite « Club Massiac », qui s’engagea dans la protection des intérêts coloniaux et l’orchestration d’une campagne de désinformation et de dénigrement contre les « Amis des Noirs ». Dans son livre Race et Esclavage dans la France de l’Ancien Régime, Pierre H. Boulle dit que les deux groupes « s’engagèrent corps à corps dans une lutte pour savoir si la Déclaration des droits de l’homme s’appliquait aux colonies. […] Ce débat fut l’une des bases de la division créée au sein de l’assemblée entre l’aile radicale et l’aile libérale, cette dernière de plus en plus définie comme représentant les « aristocrates », en particulier après l’admission des planteurs en tant que représentants des colonies. »

Il apparaît donc clairement que le terme « aristocrates » - entre des guillemets dans le texte - lancé à la face des représentants des planteurs et leurs soutiens était plutôt une injure qu’une désignation de l’aristocratie française de sang. Les Békés n’ont donc rien à voir avec les nobles de la métropole. Si les privilèges furent abolis dans la nuit du 4 août 1789 et la Déclaration des droits de l’homme adoptée en octobre de la même année, ils est à souligner que les colons blancs et leurs soutiens réussirent à faire exclure les colonies, donc les Antilles, de la Constitution et obtinrent pour elles un statut d’associées à la métropole. C’est pourquoi, lorsque l’esclavage fut abolie en 1794, cette abolition ne concernait en réalité que la métropole puisque le trafic des esclave n’a été interdit en France qu’en1818. Quand, arrivé au pouvoir en 1799, Napoléon rétablit l’esclavage, il ne faisait en réalité qu’officialiser une pratique ordinaire mais illégale constitutionnellement. L’abolition effective de l’esclavage dans les Antilles n’interviendra que beaucoup plus tard en 1848 (loi Schoelcher) sous la pression répétée des abolitionnistes Anglais.

            Cette grève contre la vie chère a donc indubitablement des accents de remise en cause des acquis du Club Massiac qui a réussi à faire des Antilles une France à part (« statut d’associé ») vivant sous une politique paternaliste faite d’inégalités sociales avec la bénédiction du pouvoir métropolitain. C’est donc ENFIN la rébellion des anciens esclaves depuis le 18è siècle.

Raphaël ADJOBI

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Commentaires
S
Je voudrais tout de suite être très clair : je me réjouis de deux observations que vous faites ici. Je m'en réjouis afin que vous sachiez que si parfois je suis dur dans mes propos, ce n'est point par animosité mais bien par la distance qui me sépare de mes interlocuteurs en matière de connaissances de certains sujet.<br /> <br /> <br /> <br /> Vous dites deux choses vraies : 1) la situation économiques des Antilles doit dépendre d'une autre géographie que celle de la France ! Vous êtes sur les mêmes longueurs d'ondes que les penseurs Antillais que sont, par exemple, Patrick Chamoiseau, Edouard Glissant, Guillaume Pigeard de Gurbert, Jean-Claude William, Gérard Delver.... et quelques autres. Leur "Manifeste pour les produits de Haute nécessité" que j'ai commenté sur mon blog vous le démontrera. <br /> <br /> 2) Je suis de votre avis que la lutte contre le capital est aujourd'hui l'affaire du plus grand nombre. Pleinement d'accord. Cependant, n'ignorons pas que dans des sphères plus restreintes, il y a des profiteurs qui opèrent allègrement et que pour les repérer il n'est pas nécessaire de lever la tête plus loin. <br /> <br /> <br /> <br /> Enfin, si nous avons l'occasion de converser en d'autres occasions, je serai content de savoir ce qu'il faut pour vivre ensemble plus humainement plutôt qu'à couteau tiré. Il faut savoir que c'est la France - l'histoire l'atteste - qui a toujours cru que pour vivre bien avec le Nègre, il faut employer la force et la domination plutôt que l'entente cordiale. Le jour où cette "race supérieure" comprendra qu'il y a une autre voie pour prospérer que la domination, nous ferons un grand pas en avant. Dans cet ordre d'idée, sachez que le Portugal fait aujourd'hui profile bas par rapport à l'Angola qui est devenu son grand investisseur et son grand financier. Demain, grâce à l'Angola, le Portugal ne sera plus le petit pays pauvre de l'Europe. N'avez-vous pas remarqué que l'on parle de la ruine de la Grèce, de l'Espagne mais plus du Portugal ? Ce n'est point parce que ce pays a définitivement coulé. Il est tout simplement en train de tracer son chemin hors de l'Europe.
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N
Je suis un français métropolitain et je suis avec intérêt l'actualité des DOM TOM car j'ai toujours été fasciné par ses territoires.<br /> <br /> Je comprend tout à fait le raz-le-bol des ultramarins devant la vie chère. C'est pour cela que je considère qu'il faut arrêter de considérer les DOM-Tom comme des colonies mais leur laisser les moyens de diversifier leur économie et leurs débouchés. <br /> <br /> Par exemple, il est absurde que la métropole Française soit le premier partenaire économique et commercial des Antilles! Il y à l'immense continent américains à côté, c'est avec les USA et l’Amérique latine que les Antilles doivent commercer et de développer, on doit donner plus de pouvoir de décision à ces territoires afin qu'ils deviennent autonomes au niveau économique et qu'ils soient une source de richesse pour la France et non pas un "petit paradis touriste qu'on fait vivre sous perfusion". Ce qui est absolument inacceptable c'est qu'il existe dans le territoire de la République des régions ayant autant de différence de PIB! Les DOM-Tom ont les moyens de se développer, laissons prendre leur place dans l'espace géographique auxquels ils <br /> <br /> appartiennent!<br /> <br /> Toutefois je suis très heureux que c'est territoires fassent partie de la République française, je crois que c'est bon pour eux comme pour nous, il ne faut pas oublier que les pays voisins sont en générale plus pauvres (sauf les paradis fiscaux certes). Il faut juste rationaliser leur économie. En outre, pour beaucoup de réunionnais ou d'antillais l'appartenance à la France est un acquis et une fierté et la plupart préfère se battre pour être reconnu dans leur nation que lui tourné le dos. Et puis arrentons avec ces vielles animosité entre blancs et noirs je rappelle que la grande majorité des français blanc sont exploités par des patrons et des bourgeois véreux! Les grands propriétaires terriens antillais exploitent les noirs comme les grands propriétaires métropolitains exploitent les blancs et je sais de quoi je parle. Ne nous trompons pas d'adversaire, les couleurs, les nations tout cela c'est du vent. Essayer de vivre ensemble dans la lutte contre l'exploitation du grand capital me parait une quête plus ambitieuse. En outre, l'immense majorités des métropolitains ne méprisent pas les noirs et sont heureux de cette diversité.
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S
Je laisse ici un lien vers un article du journal L'expansion que m'a adressé Alenya. Il y est question de la prime de la vie chère que je disais allouée aux fonctionnaires venus de la métropole. Le dernier chapitre a particulièrement retenu mon attention pour m'emmener à nuancer mon propos. Mais on peut aussi se demander pourquoi la prime n'a jamais été octroyée dans l'autre sens quand les Antillais arrivaient dans un monde plus cher que le leur ? <br /> <br /> http://www.lexpansion.com/economie/l-outre-mer-etouffe-d-etre-le-paradis-des-fonctionnaires_25454.html
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A
Bonjour,<br /> permettez-moi de répondre.<br /> Les fonctionnaires de France métro ne touchent aucune prime à la vie chère.<br /> Cette prime (40% au-dessus du salaire payé) a été instaurée a une époque où on se rendait en Afrique, aux Antilles ou dans les Iles françaises du Pacifique en bateau, uniquement pour les fonctionnaires mutés hors de France.<br /> Cette prime a été plus tard allouée aux fonctionnaires Antillais suite à leurs revendications.<br /> La conséquence a été une montée des prix dans les supermarchés qui pénalise les non fonctionnaires<br /> lesquels souhaiteraient l'abrogation de cette prime pour que les prix baissent ou... stagnent.<br /> Il semble que vous imaginez que les Antilles sont gérées par des blancs... tous les Maires et députés sont des locaux noirs.<br /> Parallèlement France métro nous avons des Maires et députés blancs. <br /> Vous devez comprendre que tout le monde est libre sur le territoire national de se présenter aux élections pour être élu député ou Maire. Aprés les électeurs choisissent. <br /> Si vous dites aux Antillais que leur territoire est une Colonie française, vous allez les vexer grave et ils auront 100 fois raison.<br /> Les Antilles c'est la France avec les mêmes idemnités de chômage en cas de perte d'emploi soit 70% du salaire (jusqu'à 3 ans), des primes à la scolarité, l'enseignement gratuit, des aides au logement pouvant atteindre voire dépasser 300€/ mois, les soins et les médicaments gratuits, des allocations familiales en centaines d'€ pour les familles à partir de 2 enfants et 40% de salaire en plus pour tous les fonctionnaires métros ou locaux...etc, plus un impôt sur le revenu plus faible qu'en France métro.<br /> <br /> Cordialement.<br /> <br /> Alenya
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S
Dire que la " prime de vie chère " a été allouée à la communauté blanche pour suivre le rytme infernal de la vie chère de la métropole n'est pas s'inscrire en faux de la réalité. Cette politique visait essentiellement à favoriser la communauté blanche. C'est une vérité historique. Si quelques noires bénéficient de cette prime, on peut dire que ce sont des cas isolés. Les Antillais qui sont dans l'administration aux Antilles ne sont pas partis de la métropole. Je ne nie absolument pas que quelques Noirs bénéficient également de cette prime. Ce n'est pas parce que un ou deux Noirs sur cents blancs bénéficient de cette prime que vous allez parler d'égalité de traitement. Ce n'est pas parce que deux ou trois blancs sur cent Noirs vont bénéficier de la nouvelle prime de 200 € que nous allons dire qu'ils sont dans une situation semblable aux Noirs. Ce n'est pas pour ces 2 ou 3 blancs que la nouvelle prime a été accordée mais pour les Noirs qui vivent une situation d'injustice.
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