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Lectures, analyses et réflexions de Raphaël
12 juin 2017

Urbi et Orbi (Olivier Merle)

                                                      Urbi et Orbi

                                                        (Olivier Merle)  

Urbi et Orbi 0001

            La locution Urbi et Orbi évoque pour le commun des hommes les bénédictions solennelles que le pape donne depuis Rome à cette ville et au reste du monde. En reprenant cette formule, ce livre d’Olivier Merle veut nous montrer comment le centre de la chrétienté s’est détaché du pays du Christ puis a dérivé pour s’être enfin ancré là où nous savons. Une dérivation extraordinaire du message de Jésus menée par des hommes portés par une foi magnifique ; des hommes parmi lesquels la figure de Paul émerge comme le plus grand tribun des premières heures de l’histoire du christianisme.

            Pour ceux qui ont lu du même auteur Le fils de l’homme, se terminant par la lapidation d’Etienne – faisant de lui le premier martyr chrétien – et la fuite des disciples de Jésus hors de Jérusalem, Urbi et Orbi est clairement le récit des chrétiens hellénistes qui croient que le message du Christ n’est pas uniquement destiné aux juifs de Judée.

            Après la mort d’Etienne, le plus ardent défenseur de la Bonne nouvelle destinée à tous les Juifs, et même aux païens sous certaines conditions, est indiscutablement Philippe. Ce disciple de Jésus originaire de la très lointaine Hiérapolis près d’Ephèse est le contraire de Jacques qui prône l’attente patiente du retour de son frère monté au ciel après sa résurrection. Homme pieux, héritier de son frère à Jérusalem, Jacques est attaché à la loi de Moïse comme une moule à son rocher ; la propagation de l’Evangile  de Jésus est le cadet de ses soucis.

            Dans leur lent mouvement d’évangélisation des Juifs vivant hors de la Judée et de quelques païens souvent acceptés après beaucoup d’hésitation, Philippe et ses partisans auront un dangereux ennemi en la personne de Paul, un Juif romain originaire de Tarse qui, comme beaucoup, ne pouvait accepter qu'un crucifié puisse être le Messie d'Israël. Mais voilà que Jésus se révèle à ce persécuteur de la secte des nazôréens appelés « chrétiens ». Dès lors, celui qui n’a pas été le disciple de Jésus se reconnaît l’élu devant porter son message profondément universel. Aux Juifs qui s’accrochent à la Loi de Moïse comme l’alliance indéfectible conclue avec Dieu, il oppose la nouvelle alliance conclue entre Dieu et le monde par l’intermédiaire du sang et de la chair de Jésus. Pour lui, la Loi (de Moïse) n’est plus nécessaire pour être sauvé mais la Foi en Christ ! Paul déclare « l’union définitive et sans exclusive entre les païens et les juifs adorant le Christ ».

            A partir de ce moment, sous le regard du colon romain attentif au moindre trouble, une lutte d’influence acharnée se déclare entre ses partisans et ceux respectueux des recommandations de Jacques, le frère de Jésus. Dépassés, Philippe et Jean joueront difficilement les conciliateurs. C’est donc cette lutte entre l’Evangile universel – parce qu’ouvert aux païens – et l’évangile exclusivement juif ayant toujours la Loi de Moïse comme référence absolue que le livre nous peint ici. Et le résultat est éclatant, magnifique ! On y découvre le poids de la circoncision sur la propagation de la Bonne nouvelle et les conversions des païens. On apprécie le pragmatisme des apôtres hellénistes ainsi que le sectarisme des Juifs qui fait d’eux les plus grands ennemis de la foi chrétienne. Etat d’esprit qui les conduit à l’invention de la ségrégation dès le premier siècle de notre ère. Un livre éblouissant à l’image du personnage de Paul qui apparaît comme le cœur et la tête pensante du christianisme naissant.

Raphaël ADJOBI

Titre : Urbi et Orbi, 489 pages

Auteur : Olivier Merle

Editeur : Editions de Fallois, 2016.  

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