De la nécessité de l'instruction pour tous (Raphaël ADJOBI)
De la nécessité de l'instruction pour tous
(Raphaël ADJOBI)
C’est aux familles et aux enseignants que nous nous adressons ; autant dire à tout le monde. Le grand œuvre commun de notre vie, c’est l’instruction de nos enfants et petits-enfants. Cette entreprise mérite toute note attention et tous nos soins.
Quand son cadre extérieur formé par les siens est assez riche, quand son cadre intérieur ou son sanctuaire que constitue l’école – ainsi que les représentations de son imaginaire nourries par ses lectures – l’est aussi, un jeune est assez fort pour ne pas être éloigné des règles sociales ou prématurément brisé par quelque vice. L’éducation domestique et l’instruction publique sont les deux mamelles de la construction de l’individu, tel que nous aimerions le voir s’épanouir sous nos yeux pour le bien de toute la société.
C’est parce que nombreuses étaient les familles qui n’avaient ni le temps, ni le savoir, ni les conditions nécessaires à l’instruction de leurs enfants que la République avait instauré les internats. Ces établissements étaient des lieux d’une socialisation propice à l’acquisition des connaissances que proposaient les enseignants. C’est dire qu’à la défaillance des familles que la République n’ignorait pas, celle-ci proposait une structure palliative ou de substitution. Malheureusement, dans ce siècle, en lieu et place d’une structure sociale tenant compte du temps, du savoir, et des conditions de vie qui manquent aux familles, on propose aux jeunes des animations qui ont pour seul objectif de les éloigner de l’oisiveté mère de tous les vices. En d’autres termes, la sécurité de la cité que pourrait menacer la jeunesse sans éducation et sans instruction est devenue le critère des investissements de l’État. Pour contenir cette jeunesse que l’on redoute, on fait appel à des travailleurs sociaux, à des associations et des bénévoles n’ayant aucune compétence pédagogique plutôt que d’investir dans les services de personnes qualifiées pour lui apporter des connaissances. Nos élus croient-ils pouvoir ainsi participer à l’instruction de cette jeunesse et la sortir des problèmes nés du manque de structures adéquates à ses besoins ? Non, ils savent très bien que leurs actions ne font qu’entretenir des problèmes et des illusions.
En effet, la République a fait son choix : on n’investit pas pour des gens qu’on qualifie de racailles ! On n’investit pas pour des gens qui ne sont rien !
Or, tout individu a besoin de se savoir important, qu’il est la prunelle des yeux de la République. La considération plutôt que le mépris invite tout individu à relever la tête et à aller de l’avant. Mais voilà : certains parmi nous savent que si les pauvres vont de l’avant, ils deviennent dangereux ; ils savent, au regard de l’histoire des femmes, qu’il faudra un jour consentir à partager le pouvoir s’ils commençaient par partager le savoir. Quant à nous, nous voudrions que les pauvres accèdent au savoir pour justement prendre le pouvoir : celui de se gouverner ! Une autre révolution est possible.
(Extrait de l’Avant-propos de Il faut remettre le français au centre de l’enseignement, une autre révolution est possible – Les impliqués Éditeur, 2021 / 10 euros).
Pensez à offrir ce livre à un(e) ami(e) enseignant(e) ou aux jeunes parents comme cadeau de Noël.